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Effets cardiovasculaires indésirables de la marijuana

par Claudine Auger

 

MÉDECINS FRANCOPHONES DU CANADA

Capsule scientifique tirée de la conférence du Dr Paul Poirier

Congrès annuel de médecine 2018

 

La récente légalisation du cannabis a soulevé les débats et plusieurs médecins, notamment les psychiatres, ont exposé leurs inquiétudes sur la tribune publique. Le Dr Paul Poirier, cardiologue et professeur à la Faculté de pharmacie de l’Université Laval et chef de secteur au programme de prévention-réadaptation cardiaque de l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec, formule ici les dangers cardiovasculaires associés à la consommation de cannabis.

 

Équilibre des effets antagonistes

Les fibres de chanvre trouvées sur les sites archéologiques suggèrent que l’utilisation du cannabis date d’au moins 8000 ans avant notre ère. Le chanvre aurait été utilisé à des fins médicales en Chine ancienne ou pour des cérémonies religieuses en Inde. Dans

l’Égypte des pharaons, le haschisch aurait été employé comme monnaie courante. Plante versatile qui circule donc depuis des millénaires, introduite en Occident par les soldats de Napoléon ayant combattu en Égypte, elle aura été, au cours des siècles derniers, contrôlée par différentes lois et récemment légalisée au Canada.

« Au 19e siècle, des préparations de cannabis étaient largement prescrites pour différents maux, notamment pour la bronchite, les brûlures, l’épilepsie, ainsi que pour ses propriétés analgésiques. L’interdiction du cannabis, au début du 20e siècle, a mené à son abandon comme agent thérapeutique », raconte Dr Poirier, ajoutant que la défense des intérêts du consommateur et des développements scientifiques ont ravivé la curiosité pour cette plante depuis les années 1980.

Véritable « ragoût chimique », comme l’explique le cardiologue, le cannabis contient près de 480 composés pharmacologiques, dont la plupart sont non psychoactifs. La composition du cannabis varie selon les espèces, les sous-espèces, les manipulations génétiques, l’exposition à la chaleur, l’air ou la lumière. Mais les substances qui intéressent les consommateurs de cannabis — médical ou récréatif, sont le THC (à l’origine d’euphorie, anxiété, psychose, troubles cognitifs ou tachycardie) et le cannabidiol (CDB ; générant peu ou pas d’euphorie, abaissant l’anxiété, aux propriétés neuroprotectrices et antipsychotiques, et ralentissant les battements du coeur). « Il s’agit donc d’antagonistes naturels (“Yin et Yan”). Les manipulations génétiques permettent de jouer sur les concentrations de THC et de CDB, selon les effets recherchés. Il faut savoir qu’une perte d’antagonisme peut conduire à une

augmentation des effets secondaires et une mauvaise tolérance, le CBD modulant plusieurs effets du THC dans le cannabis, qui en soi est une molécule délétère. »

 

Profil pharmacocinétique

Les sites d’action du cannabis dans l’organisme sont nombreux et affectent presque chaque système d’organe majeur : foie, poumons, tissus adipeux, muscles, organes reproducteurs, cellules immunitaires… coeur et cerveau.

Molécule identifiée en 1964, le THC, facilement absorbé par les poumons, est ensuite métabolisé par le foie et stocké dans les graisses. Le THC, ou delta-9 tétrahydro-cannabinol, est l’agent à plus fort effet psychoactif et la teneur en THC est couramment utilisée comme mesure de puissance de la drogue. La tolérance semble augmenter avec la consommation chronique. Par ailleurs, l’effet du cannabis peut dépendre, outre la teneur en THC, de la présence d’autres cannabinoïdes dont le cannabidinol (CBD) non psychoactif, mais aux propriétés anxiolytiques, le cannabinol (CBN) modérément psychoactif et le cannabinodial (LCCC), également modérément psychoactif.

La puissance du cannabis aurait largement augmenté depuis quelques décennies, principalement en raison des facteurs suivants :

  • Les modifications génétiques, permettant des variétés de semences et la sélection de plantes femelles ;
  • La capacité de modifier la variation des cannabinoïdes et la concentration de THC, CBN et autres composantes du cannabis ;
  • Un meilleur contrôle de l’environnement : techniques de culture, prévention de la production par fertilisation et semences ;
  • Un meilleur contrôle de la fraîcheur : le risque de dégradation de l’entreposage du THC est actuellement moins probable.

 

« Il faut surtout se rappeler que les utilisateurs de cannabis fument désormais la plus forte partie de la plante, soit la tête et les bourgeons », spécifie le Dr Poirier.

Par ses effets psychoactifs, le cannabis affecte le comportement, et plusieurs médecins s’y sont intéressés, parmi les premiers, Moreau de Tours qui a partagé ses études cliniques dès 1845 dans sa thèse Du haschich et de l’aliénation mentale, où il interprète 4 étapes d’effets : « buzz », « high », « stoned » et « come down », où se côtoient les étourdissements et les vertiges, l’euphorie, la désinhibition, le rire incoercible et immotivé, l’état de calme et de détente, l’état de rêverie.

 

Le cœur en danger

L’impact le plus néfaste du cannabis sur le cœur provient de la combustion : « Le gros problème, c’est l’absorption qui crée un contact délétère avec le réseau pulmonaire. Le cannabis étant principalement fumé, sa fumée est plus nocive que celle de la cigarette en ce qui concerne les méfaits respiratoires. Même chose également pour les dangers de la fumée secondaire. En outre, le danger semble se décupler pour les consommateurs de tabac et de cannabis », prévient le Dr Paul Poirier. Le cardiologue spécifie que la fumée de cannabis contient trois fois plus de goudron et cinq fois plus de monoxyde de carbone qu’une cigarette régulière. « Bref, un joint équivaut à entre 3 et 5 cigarettes ! »

Les fumeurs de cannabis ont tendance à inhaler plus profondément et à maintenir la fumée jusqu’à quatre fois plus longtemps dans les poumons, afin de profiter des effets psychoactifs. « En outre, le cannabis atteint une température de combustion plus élevée et brûle la gorge et les muqueuses », ajoute le cardiologue. La moitié de la teneur en THC se trouve dans la fumée qui, inhalée, peut être métabolisée dans les poumons jusqu’à 60 %. « Les concentrations maximales sont élevées et atteintes en quelques minutes (20-30 minutes), pour une durée dans le sang pour une demi-vie d’environ 20 à 30 heures. Il y a, lorsque fumé, une grande production d’irritants et de cancérigènes, en plus d’une augmentation du risque de bronchite et de toux », prévient le Dr Paul Poirier, avant de conclure : « Je suis cardiologue et je ne parle pas de cannabis médical. Dans le cas du tabac, nous avons mis 50 ans pour admettre ses méfaits sur la santé et ses impacts cardiovasculaires. Je n’attendrai pas 50 ans pour dire que le cannabis est mauvais pour le cœur. »

thc

Devant un stimulant qui augmente la pression et le rythme cardiaque, le cardiologue souligne que plus le cannabis est consommé, plus les risques de mortalité cardiovasculaire augmentent. « Il y a des rapports de cas d’effets indésirables graves, dont des arythmies supraventriculaires et ventriculaires, de thrombose coronaire, de mort subite, d’asystolie, d’angine de poitrine, d’accident vasculaire cérébral et de spasme coronaire et cérébral et microvasculaire. Des phénomènes qui ont été observés chez des patients très jeunes et des patients sans autres facteurs de risque cardiovasculaire », dénonce le Dr Paul Poirier, ajoutant que les articles scientifiques traitant des méfaits cardiovasculaires du cannabis explosent depuis 2016 et « qu’il est faux de dire qu’il n’y a pas de littérature ».
Le Global Burden of Disease Project a notamment identifié que l’abus de cannabis avait une prévalence globale de 13 625 000, et a été associé à des années de vie vécues avec incapacité, un chiffre qui a augmenté de 22 % par rapport à 1990-2013. « Et ce chiffre va augmenter avec le nombre de consommateurs », expose le cardiologue, également inquiet de constater que la Loi canadienne sur le cannabis n’est pas une source d’information étoffée couvrant tous les aspects essentiels de la consommation de cannabis.  « Entre 100 et 150 SAQ du cannabis auront bientôt pignon sur rue au Québec dans les prochaines années. C’est peut-être légal, mais ce n’est pas banal. Légal ne signifie pas sécuritaire. Légal ne signifie pas efficace. Pourquoi a-ton légalisé le pot, déjà ? À mon avis, c’est principalement économique. »

2 commentaires

  1. L’alcool n’est pas bon non plus pour la santé et c’est légal. Il faut utiliser son jugement et y aller avec modération dans tout. Autant le marijuana que l’alcool sont légalisés pour des motifs économiques (revenu pour l’Etat et diminution du crime organisé).
    Que la marijuana soit légale ou pas n’empêche pas sa consommation. Plusieurs médecins fonctionnels aux USA suggèrent de prendre du CBD pour l’inflammation, l’anxiété, etc. Il semble qu’il y a moins d’effets secondaires que les médicaments; je n’ai pas de difficulté à le croire. Faisons donc la part des choses entre le THC et le CBD afin de ne pas les mettre dans le même panier. Avant de semer la panique, attendons les résultats de plusieurs recherches en cours.

    • Merci pour votre commentaire, le propos du Dr Paul Poirier cardiologue mettait en garde la consommation du cannabis par inhalation. L’utilisation du CBD ou du THC en huile ne faisait pas partie de sa mise en garde.
      Sylvie

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